Retrouver l’innocence – L’ETE DE KIKUJIRÔ de Takeshi Kitano (1999)

Il y a quelques temps, nous parlions de Hana-bi, un autre film de « Beat » Takeshi Kitano, sorti en 1997. Nous évoquions les qualités du cinéma du trublion japonais, et notamment sa compréhension instinctive de la grammaire filmique. Kitano frappe à nouveau fort deux ans plus tard avec L’été de Kikujirô.

Dans ce film, Beat Takeshi campe un voyou un peu brut de décoffrage qui emmène un petit garçon en vacances retrouver sa mère. Le film est en réalité un prétexte, comme chez d’autres films de Kitano tels que Sonatine (1994), pour un retour en enfance, ou du moins un retour à l’innocence. À bien des égards, Kitano se comporte comme un gamin dans le film, comme un grand frère casse-cou du jeune Masao, alors qu’il a facilement la quarantaine. Malgré son comportement hargneux et son langage vulgaire, on assiste à ses actions de bonté et, finalement, à son innocence. Ceci transparait dans ses actes de gentillesse à l’égard de Masao bien sûr, mais plus globalement dans la réalisation, avec ses fameux plans fixes, son utilisation de l’imagerie des spirales, des feuilles, les chemises hawaïennes, etc. qui n’est pas sans ramener à une certaine idée de l’enfance et de la pureté.

À travers ce voyage avec Kitano, le spectateur se place au même niveau que les personnages du film et retrouve lui-même l’innocence l’espace de deux heures. On se laisse guider par Kitano, on le suit dans ses délires, on contemple le monde, la mer avec lui, on attend des dizaines de minutes durant au même arrêt de bus… Nous avons l’habitude d’en parler, mais la contemplation joue une nouvelle fois un rôle majeur dans cette caractéristique du métrage. Elle est un procédé d’une certaine puissance, qui permet au spectateur d’être imprégné plus en profondeur du film et de mieux absorber le message d’innocence.

En un sens, L’été de Kikujirô est un film nécessaire. Elle est l’œuvre contemplative d’un présentateur de télé qu’un temps tout le monde boudait. Elle rappelle ce qu’est le cinéma à travers sa construction et comment obtenir des effets d’émoi grâce à la mise en scène. Elle indique qu’il ne faut pas se fier à l’origine culturelle de son créateur pour autant qu’on ait les bonnes idées et l’inspiration. Et bien sûr, elle propose une visée très positiviste, tout en n’occultant pas les difficultés de la vie. L’été de Kikujirô est une œuvre complète à tous les niveaux – et nous n’avons même pas parlé de la bande originale de Joe Hisaishi.

Notons que le film est ressorti chez La Rabbia au cinéma en 2017 et en vidéo cette année, et qu’à cet effet, le film a été restauré. Le travail accompli est remarquable et mérite vraiment qu’on investisse quelques deniers dedans.

Crédit photo : La Rabbia

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2 commentaires sur “Retrouver l’innocence – L’ETE DE KIKUJIRÔ de Takeshi Kitano (1999)

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